Publié le Lundi 18 février 2019 à 08h52.

Des hussards noirs de la République aux soudards tricolores du macronisme

La loi Blanquer « sur l’école de la confiance » et le débat qui l’accompagne laissent présager du pire pour l’éducation nationale…

Jean-Michel Blanquer s’en piquait en entrant à l’Éducation en 2017 : il n’y aurait pas sous son ministère de grande loi scolaire portant son nom, mais simplement des « mesures de bon sens pour revenir à une école des savoirs fondamentaux »où  les élèves apprendraient à « lire, écrire et compter ». 

L’ABC du Macronisme

Un an et demi plus tard, alors que les premières mesures du nouveau Jules Ferry autoproclamé ont déjà considérablement aggravé la situation des personnels et ds élèves (parcoursup, réformes du bac et du lycée, suppressions de milliers de postes), la loi Blanquer « sur l’école de la confiance » apparaît comme le bouquet final d’un dynamitage en règle de l’Éducation nationale ! 

La loi en question, regroupement d’articles disparates sur tous les sujets chers au macronisme, vise à favoriser des « expérimentations »assez peu originales :  augmentation dans le secondaire du nombre d’heures d’enseignement, financement public des écoles privées par l’abaissement à 3 ans de la scolarité obligatoire, création de « lycées internationaux »destinés aux enfants des élites, ou encore création « d’écoles publiques des savoirs fondamentaux » qui doit permettre la fusion des écoles primaires et des collèges… Autant de mesures dont le but avoué est de permettre de dégager des économies d’échelle en supprimant des milliers de postes et d’accélérer le tri social à l’école.  

Un, deux, trois, les petits soldats…

Plus inquiétant encore, Blanquer cherche à museler par avance toute contestation possible. L’article 1 de la loi portant sur le « devoir d’exemplarité » des personnels est de ce point de vue parfaitement édifiant. Il s’agit d’étendre des sanctions disciplinaires (notamment la radiation) qui, jusque là, étaient réservées aux enseignants impliqués dans des affaires de mœurs, aux fonctionnaire de l’EN qui  « dénigreraient auprès du public par des propos gravement mensongers ou diffamatoires leurs collègues et de manière générale l’institution scolaire ». En gros, faire taire toute critique de l’institution et du ministre, notamment sur les réseaux sociaux. 

Engaillardis par ce train de mesures très inquiétants, les députés LREM et LR se sont livrés pendant le débat parlementaire à une véritable orgie d’amendements réactionnaires. Si bon nombre des plus stupides n’ont finalement pas été retenus, comme celui portant sur la suppression de l’éducation sexuelle, celui sur le retour à l’uniforme scolaire – le ministre y est « favorable, mais ne veut pas l’imposer » –, ou l’imposition de « tenues qui imposent l’autorité » pour les enseignants, Blanquer a tout de même jugé bon de remercier ses soutiens de droite en reprenant à son compte quelques propositions… 

Ainsi, le très « droitier » député de Nice Éric Ciotti a pu pavoiser après avoir fait voter l’installation d’un drapeau français dans chaque salle de classe, de la maternelle au lycée, pour mieux promouvoir les « valeurs de la république ». Amendement amendé par la gauche pour que soit fixé à côté du drapeau français… le drapeau européen. Emporté par cette floraison drapière, les députés y ont également rajouté les paroles de la Marseillaise. Quant aux enseignantEs, ils et elles n’auront même pas la consolation de se servir de ces torchons comme rideaux (qui font souvent défaut dans les salles de classes délabrées) : Blanquer, faisant finalement bon marché de son nationalisme, s’est empressé de préciser que ces drapeaux seraient « matérialisés par des affiches ». 

Étienne Bridel