Publié le Mercredi 5 octobre 2016 à 08h30.

Automobile : Derrière le décorum, la crise !

Tous les deux ans, à l’occasion du Mondial de l’automobile, les grandes firmes du secteur s’offrent la publication de centaines d’articles où les journalistes relaient les publicitaires pour en cirer les chromes...

Les dégâts causés par l’usage et la pollution automobile y sont oubliés. Et rien sur celles et ceux qui fabriquent les voitures dans les usines, sans lesquels « il n’y aurait pas de bagnoles » ! Alors que les ouvriers de Ford Blanquefort y manifestaient depuis des années pour l’emploi, Ford a préféré cette année être absent.

Il y a un an, le scandale des moteurs diesel

Tant pis pour ceux qui avaient cru malin de s’en prendre aux seuls constructeurs automobiles allemands... Toute l’industrie européenne de l’automobile est bien concernée. L’omerta commence à être levée : en circulation réelle, les voitures diesel dépassent jusqu’à dix fois les normes légales de pollution. Et le grand champion national qu’est Renault est parmi les pires constructeurs européens en ce domaine !

Des innovations en trompe-l’œil

Voilà le retour annoncé du véhicule électrique ! La réalité, c’est qu’aujourd’hui en Europe et en France, plus de 98 % des voitures neuves vendues sont toujours à moteur thermique. S’il est probable que le véhicule électrique va se développer à un rythme plus soutenu, l’immense majorité du milliard de voitures en circulation sur la planète et des 380 millions en Europe continuera dans les dix prochaines années à consommer du pétrole. Les innovations en termes de voitures autonomes ou connectées ne changent rien à l’aberration que constitue l’utilisation d’une carcasse métallique de plus d’une tonne... pour transporter deux ou trois personnes. Selon les données du syndicat SUD du Technocentre de Renault, « la fabrication d’une voiture européenne coûte 5 tonnes de CO2 »...

Du luxe... pour les plus riches

Alors que l’Europe était depuis 2010 le maillon faible d’un monde automobile toujours en croissance, les ventes d’automobiles y augmentent à nouveau depuis dix-huit mois. Il n’empêche que l’industrie automobile y est confrontée à une crise des débouchés : les marchés automobiles ont tendance à être saturés, l’usage de la voiture de plus en plus limité en ville, la pollution émise de moins en moins supportée... La stagnation des salaires du plus grand nombre les empêche d’acheter des voitures neuves, et les innovations coûteuses des bureaux d’études ne trouvent pas d’acheteurs.

En France, l’achat d’une voiture neuve est devenu le fait des entreprises – la moitié des achats – et des plus riches de plus de 55 ans. À rebours du siècle dernier, l’automobile neuve est achetée par une fraction de plus en plus étroite de la population. Pour les autres, il reste les voitures d’occasion qui roulent de plus en plus longtemps, avec les moteurs les plus polluants et gourmands en diesel ou essence.

L’emploi massacré

En France, depuis 2007, les ventes de voitures ont baissé de 10 % et la production d’automobiles neuves est passée de 3 à 2 millions de voitures. Au lieu de réduire la durée du travail et de partager le travail entre touTEs, Renault et PSA ont supprimé 70 000 emplois et précarisé ceux dont ils ne peuvent pas encore se priver. Ainsi, les intérimaires peuvent atteindre jusqu’à 90 % des effectifs sur les chaînes dans certaines usines de montage Renault.

Le retournement conjoncturel des ventes, combiné avec l’application des plans de compétitivité chez PSA et Renault, a entraîné une explosion des profits reversés en dividendes aux actionnaires et aux dirigeants mercenaires. Toujours plus de sacrifices sont imposés aux salariés.

Au 20e siècle, l’industrie automobile avait été au cœur de la croissance des économies capitalistes et de l’exploitation du travail. C’est devenu le miroir d’une société en crise où emploi, environnement, conditions de travail et de vie sont brisés. Elle est devenue irréparable !

Jean-Claude Vessillier