Publié le Lundi 8 avril 2019 à 14h56.

Catastrophes des Boeing 737 Max 356 : victimes de la soif de profits et de la concurrence

Le 10 mars, un Boeing 737 Max s’écrasait en Éthiopie, causant 157 victimes. Six mois plus tôt, un appareil identique s’était crashé dans des conditions similaires, faisant 189 morts. En réaction, le 737 Max était interdit de vol partout dans le monde. L’action de Boeing chutait, entrainant celle de ses sous-traitants, parmi lesquels une trentaine d’« équipementiers tricolores », comme les présentait la presse, travaillant également pour Airbus. Parmi ces équipementiers, deux « fleurons » de la Métropole et la Région, prétendu « berceau de l’aéronautique et de la défense » : Thales (équipements avioniques [instruments électroniques et informatiques de contrôle], système de télécommunication et de divertissement) et Safran, qui four- nit les réacteurs produits en partenariat avec General Electric, les roues, les sièges, les freins en carbone, le système de câblage électrique, etc. Sans oublier Michelin qui produit les pneus. Tant que l’enquête sur les causes de l’accident n’avait pas abouti, chacun pouvait craindre d’y être pour quelque chose... 

Il s’avère que la responsabilité́ incomberait à Boeing et à l’organisme US de sécurité́ délivrant les certifications nécessaires. Les accidents seraient dus au déclenchement intempestif d’un dispositif automatique de sécurité́ dont la mise au point a été manifestement insuffisante ; les certifications de ce nouvel appareil ont été déléguées à Boeing par l’organisme de sécurité́ pour « gagner du temps », une pratique semble- t-il courante ; enfin, les pilotes n’ont pu mettre en œuvre les procédures de désactivation du système défaillant faute d’une formation suffisante. 

Sous le titre « Le Boeing 737 Max, l’avion qu’Airbus a poussé à faire » et avec une certaine stupidité́ chauvine, un journal économique expliquait cette précipitation par la volonté de Boeing de répondre à la sortie, qu’elle n’avait pas anticipé́, de l’A320 Neo d’Airbus, plus léger, plus puissant et plus économe en carburant. D’où la modification hâtive du vieux 737 en 737 Max... 

Derrière la responsabilité́ criminelle de la direction de Boeing se trouve celle de l’économie de marché, de la concurrence aveugle, de la course à la rentabilité́ financière que se livrent les entreprises pour les seuls intérêts de leurs actionnaires. Cette concurrence est non seulement criminelle, elle est une absurdité́ sociale et économique. Les avions, Boeing ou Air- bus, comme tous les produits de tous les autres secteurs, automobiles, informatique, etc., sont à quelques différences près le résultat de l’assemblage de composants pratiquement identiques, fabriqués par les mêmes équipementiers, mettant en œuvre la coopération de millions de travailleurs de toutes nationalités.

C’est l’illustration des progrès extraordinaires réalisés dans le domaine de la division et de la socialisation internationale du travail. Mais les accidents de Boeing comme bien d’autres catastrophes, telles l’effondrement du pont de Gènes récemment, ou encore la destruction de l’environnement, montrent à quel point ces progrès techniques, fruits de notre travail commun, se heurtent aux intérêts d’une minorité́ de parasites sociaux, grands institutions financières, fonds d’investisse- ment, qui imposent leur loi à l’ensemble de l’économie mondiale, entretenant la concurrence entre les sociétés qu’elles contrôlent pour mieux nous exploiter. 

C’est cette coopération qui existe entre nous, travailleurs du monde entier, qui, poussée jusqu’au bout, peut permettre de nous débarrasser de l’économie de marché et de la loi du profit maximum, en établissant notre contrôle collectif et démocratique sur l’économie pour produire en fonction des besoins de tous, dans le respect de la sécurité́ et de l’environnement. 

Daniel Minvielle