Publié le Samedi 13 mai 2017 à 09h15.

Grèce : Fumée blanche, jours sombres

Euklidis Tsakalotos, le ministre des Affaires économiques, a soupiré d’aise à la mi-semaine, après la conclusion d’un accord entre l’Union européenne et le gouvernement grec : « les négociations sont finies, on voit sortir une fumée blanche », en allusion à l’élection d’un nouveau pape.

Dans son journal Prin, le NAR, principal groupe de la gauche révolutionnaire grecque et composante d’Antarsya, commente très justement : « fumée blanche, mais jours sombres pour les travailleurEs ! »

En effet, cet accord, qui doit être ratifié par le Parlement grec avant d’être approuvé en Eurogroupe, est une nouvelle catastrophe pour le peuple de Grèce. Cela sera décliné très concrètement lors de la discussion qui sera conclue par le vote du 17 mai. Pour rester dans les objectifs fixés par ses créanciers, la Grèce, qui a obtenu pour 2016 un excédent de 4,2 %, doit obtenir 1,75 % en 2017 et 3,5 % en 2018, et cela ne peut être obtenu que par l’acceptation de 140 « actions » supplémentaires au détriment des intérêts populaires, correspondant à un montant de 3,8 milliards d’économies pour la période 2019-20 !

Parmi celles-ci, une nouvelle baisse des retraites : après les baisses successives de presque 50 % en moyenne depuis 2010 qui ont contribué à appauvrir davantage une population frappée par le chômage, la nouvelle baisse sera en moyenne de 9 %, allant jusqu’à 18 %. Les impôts augmenteront, touchant exclusivement les petits et moyens salaires, d’autant que le seuil des non-imposables passera de 8 640 à 5 680 euros annuels de rémunération. Les supermarchés et grands pôles commerciaux devront ouvrir 32 dimanches par an dans des zones considérées comme touristiques (Athènes, Thessalonique, bords de mer – innombrables en Grèce ! – et autres endroits…). À ce propos, cela vaut la peine d’écouter le ministre de l’Économie Dimitri Papadimitriou, expliquant que le gouvernement était en désaccord avec cette mesure, mais que « Nous pouvons la voir comme une forme de modernisation, du fait que l’ouverture des magasins le dimanche est quelque chose d’autorisé dans la plupart des pays d’Europe et aux USA »...

Divisions à gauche

C’est ce ton, entre cynisme et naïveté, qui régit le nouveau recul de ce gouvernement qui a déjà tellement déçu les secteurs populaires qui avaient cru à son discours radical. Le gouvernement explique que d’une part, les mesures sur les retraites ne toucheront « qu’un tiers » des retraitéEs, que d’autre part, si l’économie se porte bien, les hausses d’impôt seront moindres que prévues. Ainsi, une personne touchant annuellement 10 000 euros paie aujourd’hui 300 euros, et si tout va bien, il en paiera 750 en 2019 au lieu de 900 !

Tsipras se réjouit d’avoir pu faire revenir l’UE aux conventions collectives : en fait, cela sera décidé en fonction d’une prochaine évaluation, et à l’inverse, les licenciements viennent d’être facilités, se passant des actuelles autorisations administratives…

Les réactions politiques sont celles des Tartuffe de la droite et du Pasok qui veulent jouer la carte populiste... après avoir démantelé les couvertures sociales entre 2011 et 2015. Sans oublier le grand patronat qui utilise l’argument de l’asphyxie réelle des PME pour exiger moins d’impôts.

À gauche, la condamnation est évidemment ferme, mais au poids des défaites dans les luttes, des trahisons électorales, ainsi qu’à l’isolement européen, se rajoute l’absence d’unité ! Le 1er mai, les cortèges étaient fournis... mais plus séparés que jamais : même chez Antarsya, une partie défilait à 2 km de l’autre. Il est évident que la question de l’unité d’action sera cruciale pour avancer, et il faut la construire pour réussir la grève appelée pour ce 17 mai.

D’Athènes, A. Sartzekis