Publié le Mercredi 10 avril 2019 à 15h36.

Face à Macron et son Grand blabla : c’est dans la rue que ça se passe !

Après trois mois de campagne de Macron, trois mois de grand blabla largement répercuté par les médias, le gouvernement s’organise pour détourner, à son profit et au profit de ses amis les capitalistes, les colères et les revendications qui s’expriment dans le pays.

C’est dans le cadre abrité du Grand palais, devant un public trié sur le volet, que le Premier ministre Édouard Philippe a rendu compte du grand blabla mis en place pour prolonger le gazage des manifestantEs par un enfumage censé recueillir les attentes des « FrançaisEs ». En effet, si, malgré les invitations récurrentes à se saisir des questions d’immigration, celles-ci ont été quasiment absentes dans les thèmes abordés, gouvernantEs et grands médias limitent leurs propos et leurs propositions aux seulEs françaisEs, feignant d’oublier l’existence même des migrantEs, des travailleurEs immigréEs. Faut-il rappeler que, majoritairement, ils et elles n’ont pas le droit de vote ? 

Une salle remplie par des éluEs, des politiques de connivence et une restitution à laquelle, selon BFM TV, 90 % des 75 000 citoyenEs invités ont refusé de participer. Et dans le même temps, aucune chance de trouver dans les grands médias ne serait-ce qu’un aperçu de ce qu’ont débattu à Saint-Nazaire ce week-end, les 700 représentantEs des plus de 200 délégations de Gilets jaunes, issus des ronds-points, des assemblées, des manifestations, qui se poursuivent depuis cinq mois (voir ci-contre et page 12).

Les reculs sociaux et la répression comme seules réponses

Profitant de la multiplicité des demandes exprimées, le gouvernement est bien décidé à faire un tri des décisions confortant les grandes orientations mises en œuvre depuis deux ans. La proximité des élections européennes lui impose néanmoins de tergiverser encore quelques semaines. 

Ce qui est déjà très concret, c’est la répression de toutes celles et ceux qui depuis des mois expriment leurs colères : des dizaines de blesséEs graves, des milliers de contrôles préventifs, d’arrestations et de condamnations (2 000 condamnations depuis le début du mouvement, dont 40 % de peines de prison ferme), avec le déploiement de l’armée et l’utilisation d’armes dangereuses. 

Quoi qu’il en soit, la logique des réformes prévues ou engagées est très claire. Pour les retraites, les fausses hésitations masquent mal la réalité : baisser les pensions, pénaliser les départs à l’âge légal, favoriser le développement des complémentaires pour celles et ceux qui en ont les moyens. Et cela au moment où le patron d’Airbus, Tom Enders, bénéficierait d’un surplus de retraite de 1,3 million d’euros par an, ou quand le gangster Carlos Ghosn voit lui échapper de peu une retraite chapeau de 765 000 euros par an qui devait s’ajouter à sa pension réglementaire.

En matière de fiscalité, pas question de revenir sur l’ISF, dont ils osent déclarer que son retour n’est exigé que par 10 % de personnes, déconsidérant ainsi l’ensemble des données de la restitution, ni de supprimer l’injuste TVA sur les produits de première nécessité. Pas question non plus de s’attaquer aux 500 fortunes qui représentent 25 % du PIB aujourd’hui (contre 6 % en 1996 !). Et face à la demande de renforcement des services publics, la réponse indiquée par Édouard Philippe consiste à poursuivre leur « réorganisation », c’est-à-dire en fait leur désorganisation, voire leur destruction... La suppression de 120 000 postes de fonctionnaires, la démolition du statut d’ici la fin du quinquennat sont toujours d’actualité.

Construisons le « TouTEs ensemble » !

Les prétendues solutions du pouvoir sont en tout cas bien éloignées de l’Assemblée des assemblées de Gilets jaunes réunie à Saint-Nazaire : « Nous appelons à tous les échelons du territoire à combattre collectivement pour obtenir la satisfaction de nos revendications sociales, fiscales, écologiques et démocratiques. Conscients que nos avons à combattre un système global, nous considérons qu’il faudra sortir du capitalisme. Ainsi nous construirons collectivement le fameux "Tous ensemble" que nous scandons et qui rend tout possible. […] Ne nous regardez pas, rejoignez-nous. Le pouvoir du peuple, par le peuple, pour le peuple. »

Pour imposer nos revendications, la meilleure façon de nous faire entendre reste en effet notre mobilisation. L’ensemble des organisations qui refusent le monde de Macron doivent s’engager pour construire les ripostes nécessaires. Contre la répression, il est urgent de développer un front commun pour le soutien des blesséEs, des condamnéEs, de celles et ceux qui sont mis en examen, pour faire reculer la politique du pouvoir d’aggravation des lois répressives.

Les personnels de l’Éducation nationale (massivement en grève jeudi dernier), les jeunes pour le climat, les locataires contre les expulsions, et bien d’autres, résistent. Nous devons faire converger ces résistances, les faire se joindre aux initiatives des Gilets jaunes. En particulier, la bataille pour le pouvoir d’achat, contre les inégalités salariales, notamment entre les hommes et les femmes, doit, par la grève, s’ancrer dans les entreprises.

Le jeudi 11 avril pour les retraites, le samedi 13 contre la répression et pour la liberté de manifester, les samedis aux côtés des Gilets jaunes, doivent être l’occasion de construire ce « Tous ensemble ». De l’autre côté de la Méditerranée, la mobilisation du peuple algérien qui a déjà imposé le départ de Bouteflika nous montre que quand on se mobilise, il est possible de gagner.

Robert Pelletier