Publié le Jeudi 28 octobre 2010 à 23h22.

Épreuve de force dans les raffineries

Les coups de force du gouvernement contre les grévistes de la raffinerie de Grandpuits (Seine-et-Marne) ne parviennent pas à masquer l’essentiel : la plupart des raffineries du pays sont arrêtées, les grèves sont toujours aussi massives, plus une goutte d’essence n’est produite. Ne reculant devant rien, les patrons du pétrole ont profité de cette semaine de grève pour annoncer la fermeture des raffineries de Reichstett (Bas-Rhin) et de Flandres (Nord), au mépris de la décision de justice donnant raison aux salariés. Cela n’a fait que renforcer la détermination des grévistes. Le pouvoir s’acharne sur les grévistes de la raffinerie de Grandpuits. La première réquisition du 18 octobre a été retirée par le préfet lui-même pour ne pas la voir cassée par le juge car elle faisait référence à une ordonnance abrogée. Mais la préfecture de Seine-et-Marne s’entête et a pris, vendredi 22 octobre, un nouvel arrêté de réquisition visant 169 salariés et a déchaîné une violence policière extrême face à la solidarité des habitants du quartier ou des militants d’autres corporations venus protéger d’un « cordon citoyen » les salariés réquisitionnés. Cet arrêté a été annulé le soir même par le juge administratif. Le préfet a pris alors immédiatement un troisième arrêté, visant douze salariés, afin de remplir les camions à partir des stocks. Ce préfet qui attaque si violemment le droit de grève agit bien évidemment sur ordre de Sarkozy, celui-là même qui déclarait il n’y a pas si longtemps que « désormais, quand il y a une grève en France, plus personne ne s’en aperçoit ». Derrière ce harcèlement préfectoral et policier se cache la rage d’être confronté à la grève totale d’un secteur majeur de l’économie non corseté par un système de préavis, de service minimum, ou d’autres déclarations préalables. Il y a aussi dans ces épreuves de force une grosse opération de communication du gouvernement. Il voulait pouvoir annoncer que l’ordre règne et que les voitures et les trains circulent au début des vacances scolaires. Il a pour cela donné la priorité aux stations service des autoroutes. Mais sur le fond, rien n’est réglé. La raffinerie de Grandpuits est une petite raffinerie qui représente moins du tiers de la raffinerie de Gonfreville (Seine-Maritime) et moins de la moitié de celle de Donges (Loire-Atlantique), de Port-Jérôme à Notre-Dame-de-Gravenchon (Seine-Maritime) ou de Lavéra (Bouches-du-Rhône). La pénurie de carburant est bien réelle et l’économie est touchée dans son fonctionnement. C’est la rançon du choix du tout camion. La grève n’a rien perdu de son efficacité, bien au contraire, elle commence à se faire sentir. Le Medef est « inquiet », ce qui ne fait que nous rassurer.Christine Poupin