Publié le Mercredi 25 septembre 2013 à 17h25.

Grèce : riposter au crime nazi

La semaine écoulée devait être celle du retour en force des mobilisations sociales : grève nationale sur cinq jours reconductibles des enseignants du second degré, avec 48 heures de grève de tout le secteur public les 18 et 19... La mobilisation a bien été énorme (90 % de grévistes le lundi, et gigantesque manif),et elle continue avec une grève reconductible. Mais ce qui a ébranlé le pays, c’est évidemment l’assassinat de Pavlos Fyssas par un nervi d’Aube dorée. Avec ce meurtre commis de sang froid se met en œuvre ce que dit la coalition Antarsya : c’était bien une question de temps, car après « s’être fait la main » en blessant parfois à mort des immigréEs sans que la protestation dépasse vraiment les cercles antiracistes, les « hordes d’horreur » étendent maintenant leurs crimes à l’ensemble du mouvement ouvrier. L’assassinat de Pavlos s’inscrit dans une sorte de course de vitesse où le groupe nazi, qui a subi des défaites (cf. l’Anticapitaliste n°208) doit reprendre la main vis-à-vis de ses troupes et prouver son allégeance à ses financiers. D’où deux autres faits d’armes : il y a deux semaines, une équipe du KKE (PC grec) qui collait dans la banlieue ouvrière de Perama a été agressée par une cinquantaine de nervis armés d’Aube dorée : 9 blessés. Leur objectif a été révélé par une vidéo filmée par ces abrutis eux-mêmes : ils agissaient sur demande d’armateurs qui voulaient casser le syndicat des chantiers navals dirigé par le KKE ! Et samedi 14 septembre, ils ont voulu laver l’humiliation de la mobilisation antifasciste de l’été, et ont donc organisé une descente nationale à Meligala, village où la Résistance avait liquidé des « collabos » des nazis, et où chaque année, la droite extrême et l’extrême droite font une cérémonie. Avec environ 300 à 400 sbires en tenue paramilitaire, ils ont saboté la cérémonie, provoquant la colère jusque dans les rangs de la droite !

Colère populaire, riposte ouvrière ?Ces deux faits, ainsi que leur tentative de traduire en justice le conseiller municipal d’Antarsya à Athènes, Petros Konstantinou, qu’ils menacent de mort, indiquent leur volonté d’étendre la sphère de leurs méfaits. Le  meurtre de Pavlos Fyssas entre dans cette logique. La colère populaire qui a suivi le meurtre a été immédiate : veillée toute la nuit, dizaines de milliers de personnes aux rassemblements, pour dire stop à Aube dorée et rendre un hommage populaire à un homme connu et estimé pour son action sociale, son antifascisme, son courage et son talent. Pavlos Fyssas, 34 ans, était un rappeur de premier plan, Killah P. Tout le contraire des nazis ! Avec ce meurtre, c’est tout le réseau de protection de Aube dorée qui apparaît. La responsabilité du PASOK et de la droite dans la situation sociale et politique ; la complicité ouverte de certains dans l’entourage du Premier ministre ; la promotion par les grands médias ; les liens avec les corps de répression… Le meurtre de mercredi a remis en cause la grande mansuétude du gouvernement, qui a ordonné brusquement de traduire en justice des dizaines d’affaires de violences nazies jusque-là étouffées. Mais le vrai enjeu reste l’action des organisations ouvrières, jusqu’ici fort discrètes. Les manifestations de grévistes sont depuis jeudi dernier antifascistes, et ce mercredi 25 septembre, les centrales syndicales appellent enfin à un grand rassemblement antifasciste...

D’Athènes, A. Sartzekis